« Car c’est la capacité d’adaptation de l’humain qui crée la plus grande souffrance. »
Jens Liljestrand

Les comptes-rendus-avis de lecture de la librairie Vaux Livres

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Romans traduits par Eric Boury

Sigrídur Hagalín BJÖRNSDÓTTIR

Eruptions, Amours et autres cataclysmes
Gaïa

15 | 328 pages | 13-02-2024 | 23€

en stock

Anna Arnardóttir, prof de volcanologie, directrice de l’Institut des Sciences de la Terre est une éminente scientifique : connaissance parfaite de son domaine, sûre d’elle ( « Simpliste, idiote et ignorante des forces auxquelles je me frotte, comme une gamine qui s’amuse avec une arme de destruction massive. »). Elle a suivi ce parcours soutenue par son père alors que les liens avec sa mère furent plus distants. Entre attirance et peur, fascination et crainte, beauté et violence, les volcans font partie de la vie, de l’ADN des Islandais. L’Islande leur doit tout, sa naissance mais peut-être aussi sa disparition (« En résumé, l’Islande n’est pas une véritable terre, mais un malentendu géologique, elle a été créée par hasard et continue de l’être... »). Cet attrait est donc pour Anna autant intime que professionnel. Anna mène une vie sereine, tranquille avec son mari très aimant et deux enfants. Mais le feu couve sans qu’elle le sache, le maîtrise... Un départ pour un travail sur le terrain, une rencontre fortuite avec un photographe, Tomas Adler et c’est l’éruption inattendue, elle qui pense tout maîtriser tombe follement amoureuse et ce volcan d’amour met en péril sa vie familiale, bouleversement intime, attirance, crainte de l’avenir... Le récit établit alors un parallèle (parallèle entre nos sentiments, nos attentes, secousses d’un volcan, secousses d’une vie, naissance d’un enfant et croûte terrestre qui se déchire...) bienvenu tant le vocabulaire de ces deux domaines est partagé et commun. Et à plus de quarante ans, un amour puissant peut être aussi dévastateur et violent qu’une lave que rien n’arrête... Superbe et dense roman, réflexions sur la science et l’histoire islandaise, plongée dans le quotidien islandais et dans l’âme humaine avec un parallèle judicieux.

« Quelle poésie serait capable de rendre compte du moment où le magma se fraye un chemin dans les entrailles de la terre jusqu’à sa surface ? Regarde ces vapeurs, leur couleur, leur luminosité, sens le sol qui tremble sous tes pieds, quel poème pourrait exprimer tout ça ? »

« ... l’amour est la chose la plus grandiose et la plus terrible qui puisse nous arriver, il met le monde sens dessus dessous, il nous prive de notre assurance et de notre intrépidité, c’est une faille qui s’ouvre sous nos pieds, un gouffre sans fond où n’existe que la terreur de perdre celui que nous aimons.... Aimer signifie vivre dans une peur permanente. »

« ... il arrive que l’intelligence fasse preuve de stupidité et d’arrogance. Elle nous donne parfois une assurance illusoire. Elle conduit parfois les gens à penser qu’ils contrôlent des choses qu’il est impossible à contrôler. Parfois, la raison n’est qu’une illusion... »

Ecouter la lecture de la première page de "Eruptions, Amours et autres cataclysmes"

Fiche #3139
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Jón Kalman STEFÁNSSON

Mon sous-marin jaune
Bourgois

14 | 405 pages | 28-01-2024 | 22€

La vision de Paul McCartney dans un parc londonien en août 2022 surprend le narrateur qui est écrivain. Il s’agit du héros de sa jeunesse et il rêve de lui parler. Pour lui dire quoi ? Il doit trier ses souvenirs et va donc nous faire voyager dans le temps et l’espace : de son enfance à 2023, Islande, Moyen-Orient, Londres, les croyances, la musique, un sous-marin jaune et les Beatles, la vie et les personnes attachantes rencontrées, la mort. Enfant, il apprend en effet la mort de sa mère en voiture avec son père. Un mur et le silence les sépareront à jamais. Il trouve un premier réconfort dans la beauté de la nature sauvage des fjords (et des habitants même bourrus) avec sa belle-mère, un apaisement rapidement complété par ses visites à la bibliothèque (« un second foyer »), un premier et essentiel contact avec le livre qui orientera certainement sa vie. Sans jamais perdre le lecteur, Stefánsson nous fait passer d’un pays à l’autre, d’une époque à l’autre, de la fiction à la réalité. Un récit autobiographique original expliquant son chemin vers l’écriture, son amour de la fiction (« … j’ai toujours eu une dent contre la réalité, que je me suis employé à repousser, mettre en doute, démolir, transformer. ») qui éclaire ses précédents romans pour ceux qui les ont lus et qui incitera espérons-le les autres à les découvrir.

« Le passé ne passe jamais, il colle à la peau et refuse de nous lâcher. Il est dans tout ce que nous faisons, pensons, ressentons, pourtant, il ne revient pas. »

« Parce qu’il faut du courage pour aimer, et qu’on doit en manquer pour cogner ? »

« … celui qui prétend comprendre le monde est soit un idiot soit un menteur. »

« …au royaume de la sterne, la vie est plus forte que la mort. »

« Je m’efforce de cacher ma tristesse et mon chagrin lorsque je comprends que la vie a toujours prospéré en passant par la mort. »

« Ah, qu’il est ennuyeux d’être mort. »

« Celui qui passe trop de temps dans la solitude perd sa faculté d’étonnement. Celui qui ne sait plus s’étonner se change en eau croupie et pauvre en oxygène. »

« Je dois donc creuser plus profond encore, c’est alors que m’apparaît le principe de l’oubli, et je constate que c’est le terreau sur lequel prospèrent la cruauté, l’intransigeance et la violence. »

Ecouter la lecture de la première page de "Mon sous-marin jaune"

Fiche #3136
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Audur Ava OLAFSDOTTIR

Eden
Zulma

13 | 250 pages | 31-10-2023 | 21.5€

en stock

Alba est une linguiste spécialisée dans les langues minoritaires, donc en voie d’extinction. S’interroger, analyser les mots, c’est son métier, mais n’est-ce pas aussi s’interroger sur l’homme ? Elle voyage beaucoup et prend l’avion régulièrement, son empreinte carbone prend ainsi part à une autre extinction annoncée… Elle est aussi relectrice-correctrice et travaille actuellement sur les textes d’un poète avec qui elle a eu une aventure alors qu’il était étudiant et elle le vit mal. Alors sur un coup de tête et deux fautes d’orthographe, elle quitte tout, pour rejoindre un coin perdu de l’Islande (« Le seul bruit que tu entendras, c’est le hurlement du vent. ») et décide de planter moult arbres (« … il faut planter trois cent cinquante arbres pour compenser chaque vol par-dessus l’océan. ») pour tenter de compenser, d’entretenir la vie, de combattre… Elle rencontre les villageois (et découvre leur amour pour leur langue) mais aussi les réfugiés qui s’échouent en Islande (« il n’y a pas que des cétacés qui s’échouent sur les côtes de ton pays…) et notamment le jeune Danyel. Les mots, la grammaire, les arbres, la nature, Alba les aime, les respecte, les palpe, les observe, les décortique avec attention et tendresse et dans sa retraite ou son retrait, elle perpétuera cette passion et son combat : planter les arbres, mettre les mots islandais à disposition des migrants. Toujours un bonheur de retrouver la sensibilité d’Audur Ava Olafsdottir qui excelle pour laisser tranquillement le lecteur rentrer dans l’intimité d’Alba page après page, mot après mot (et ils sont pesés), proposer sans rien imposer et malgré un état des lieux objectif et noir, la conclusion reste optimiste.

Ecouter la lecture de la première page de "Eden"

Fiche #3107
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Einar Mar GUDMUNDSSON

Un été norvégien
Zulma

12 | 330 pages | 12-07-2020 | 22€

Un été norvégien aurait pu rendre compte des lamentations, des regrets débordant d’aigreur et de mélancolie d’un écrivain vieillissant se retournant vers sa jeunesse mais E. M. Gudmundsson a évité ce piège avec tendresse et joie. Il nous offre le roman d’une génération d’Islandais ancrée dans l’Europe entre la Norvège et l’Europe du sud, une génération de « trop jeunes pour être hippies et trop vieux pour être punks ». Alors ils flirteront avec les idées anarchistes, prendront la route, et Gudmundsson entamera son chemin de littérature et de poésie (« Je suis devenu poète même si j’ignorais ce que ça signifiait. Je ne le sais toujours pas, la poésie, c’est une pièce dans laquelle on pénètre, et d’où on ne ressort jamais. »). Vivre, écrire. « Ecrire, c’est vivre ». Et pour vivre, des petits boulots. Apres, durs, en Norvège notamment. Ils y brûleront leur jeunesse accompagnée parfois par la drogue. Gudmundsson invite parfaitement le lecteur à le suivre, à l’accompagner, dans ses rêves, dans ses naïvetés, dans son amour de la poésie, dans son admiration d’auteurs. Le regard sur sa jeunesse est réaliste enrichie d'une pointe d’ironie sans mélancolie. Un bel et discret hommage à la jeunesse, au voyage, à la poésie, aux rêves et à la poésie.

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Fiche #2555
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Audur Ava OLAFSDOTTIR

Miss Islande
Zulma

11 | 01-09-2019 | 21.5€

Découvrir un nouveau roman d’Audur Ava Olafsdottir procure toujours un grand bonheur, notamment pour ses personnages, leurs failles et leur humanité. Pourtant dans « Miss Islande », peut-être de manière plus prégnante que dans ses précédents romans, l’Islande n'est pas loin d'être le personnage principal, ce pays attaché à ou amoureux de ses volcans, de la mer, de son climat, de ses couleurs souvent sombres, « spectacle aussi grandiose que terrifiant ». Mais l’Islande, est aussi le pays des mots où « il est un mot pour chaque pensée qui vient au monde ». Les trois autres personnages baignent dans cet espace, la jeune Hekla (nom d’un volcan) persuadée de son destin d’écrivaine quittera rapidement son père pour Reykjavik et occupera des petits boulots en attendant. Elle y retrouvera son ami Jon John, homosexuel, et son amie d’enfance Isey qui deviendra très (trop ?) rapidement maman de deux enfants et figera ainsi si vite son avenir. Hekla passe autant de temps avec sa machine à écrire (même dans le monde de l'écriture, être femme peut être un handicap) que Jon avec sa machine à coudre, il est en effet styliste. Ces deux là dénotent, ne rentrent pas dans les cases habituelles. Et en 1963, leurs différences sont vécues par certains comme des agressions et ils peuvent parfois leur faire savoir avec violence. Mais Hekla et Jon resteront unis pour faire face. Encore donc de beaux portraits lumineux et attachants, deux poètes combattants pour leur différence et leur liberté face aux vieux conservatismes.

« Nous sommes tous pareils, des baleines déboussolées et mortellement blessées. »

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Fiche #2411
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Eirìkur Örn NORDDAHL

Gaeska
Métailié

10 | 277 pages | 07-08-2019 | 18€

L’Islande vit quelques mutations étonnantes et deux couples principaux éclairent cette période atypique sur quatre jours. Un couple de députés (la femme deviendra premier ministre) aux vues politiques opposées, l’attachée parlementaire de la première et son mari ouvrier. Meilleure preuve du changement : le député de droite se laisse aller à quelques pensées de gauche (surtout quand il se retrouvera avec dans ses bras la petite Amelia à la recherche de ses parents clandestins) mais ce n’est rien devant ce qui attend le pays : certaines femmes prennent le pouvoir pendant que d'autres se jettent de la fenêtre de leur appartement, la crise économique et sociale ébranlent le pays, les banques frisent la déroute, un nombre important et inédit d’immigrés sortis de nulle part envahissent le pays, tout change, sauf la nécessité selon certains d’emprunter et le directeur français du FMI et « son phallus n’était pas des plus regardants. » Un roman fou, très singulier, l’auteur nous offre un texte déjanté mais cette folie est loin d’être gratuite, elle offre aussi une belle réflexion débordant d’humour (de tous types) sur la société islandaise, sur le système qui étreint nos pays, sur nos démocraties (les réflexions d’anthologie du jour 4 entre 21h00 et 00h00 sont à lire et relire avant chaque scrutin !), sur les dérives possibles qui nous attendent mais aussi sur l’immigration, la différence, la religion et sur la place de la femme dans ce chaos machiste. Acceptez la douce folie de Eirìkur Örn Norddhal et vous ne regretterez pas ce drôle de voyage en Islande !

Ecouter la lecture de la première page de "Gaeska"

Fiche #2389
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Arni THORARINSSON

Treize jours
Métailié

9 | 286 pages | 15-12-2018 | 22.9€

Einar est à un tournant de sa vie. Ou plutôt à Treize jours » d’un nouveau tournant de sa vie. Treize jours et trois ultimatums : décider s’il rejoint sa dernière maîtresse, banquière énigmatique recherchée par la police, décider de son avenir au sein du Journal du soir, et enfin retrouver (peut-être avec l’aide de la police) le tueur d’une lycéenne retrouvée assassinée dans un parc. Or, cette lycéenne lui rappelle sa fille Gunnsa plus jeune qui va se joindre à lui et avec fougue pour l’enquête en ignorant parfois les dangers face à une jeunesse en pleine dérive fricotant avec les milieux interlopes du monde de la nuit, prostitution, drogue, alcool, et autres réseaux sociaux… Et naturellement les relations entre Gunssa (bien partie pour prendre la suite d’Einar) et son père croiseront le déroulement de l’enquête et les choix finaux d’Einar. Des personnages humains, sensibles, en prise directe avec les difficultés de la vie, des relations amoureuses et filiales et du monde du travail, un polar noir très contemporain au cœur d’une société islandaise minée comme d’autres par les difficultés sociales et économiques.

« Il n’y a aucune limite à ce dont l’homme est capable. Ca se vérifie tous les jours. Nous ne sommes que des animaux. Nous sommes des prédateurs, des prédateurs en tenue de camouflage. »

Ecouter la lecture de la première page de "Treize jours"

Fiche #2255
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction : Eric Boury


Gudbergur BERGSSON

Il n'en revint que trois
Métailié

8 | 207 pages | 25-03-2018 | 18€

Gudbergur Bergsson avec son style épuré dresse le portrait du peuple islandais du XX ème siècle au travers d’une famille (jamais prénommée) installée dans une ferme isolée dans la campagne du pays. Des paysages décharnés et une nature que l’on ne peut qualifier de luxuriante ! Paysage ardu, vie ardue, personnages ardus. Pourtant, c’est le XXème, alors sans crier gare, imperceptiblement, le monde extérieur s’invite dans cet environnement, les visiteurs passent, certaines et certains s’éloignent, certains reviendront, d’autres non. La modernité et le « progrès » pointent leur nez et leurs effets… Qu’est-ce qui peut attirer dans ce lieu rugueux et lunaire où la vie reste un combat ? L’auteur dresse un portrait humain, sans épargner ses compatriotes, avec franchise et profondeur, il entraîne et aimante immédiatement le lecteur avec un ton et une écriture personnels au cœur de ce pays qui a pris une place prépondérante dans la littérature européenne, après le douloureux et inoubliable « Deuil », le voyage en vaut la peine !

« Parce que être libre signifie à la fois jouir de certains droits et être garant de la liberté et des droits d’autrui. »

« Les guerres sont-elles nécessaires pour que les hommes et les nations apparaissent sous leur jour véritable ? La paix fausserait-elle l’image des individus et des peuples ? »

« Cette conversation vit surgir l’étrange forme d’humour qui s’empare de certains vieillards quand ils comprennent qu’ils ont un passé aussi long que leur avenir est bref. »

Ecouter la lecture de la première page de "Il n'en revint que trois"

Fiche #2116
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Eirikur Örn NORDDAHL

Heimska La stupidité
Métailié

7 | 158 pages | 23-02-2017 | 17€

Un couple d’écrivains islandais vient d’exploser, ils vivent dans une société sous surVeillance (« Aki et Lenita étaient jadis deux individus civilisés. »), les caméras sont partout, la téléréalité est devenue réalité, transparence totale, tous sont surveillés tout en surveillant les autres, pour leur sécurité naturellement, la population l’a acceptée et le supporte, peut-être l’a-t-elle attendue cette solitude moderne ! Alors en toute transparence, Aki et Lenita vont s’affronter, compétition sexuelle et littéraire (le plagiat dans la transparence est-il possible ?). Ils écrivent le même roman et partagent par caméras interposées leurs ébats… Pourtant, certains, installés dans une ancienne usine de crevettes, envisagent une autre société mais il leur en coûtera cher… Court roman mordant et percutant, au rythme et au style impeccables, décrivant avec grande vraisemblance et ironie (voire joie) une société aliénée à l’observation de son voisin adoré !

Sur le même thème mais sur un tout autre ton, lire l'indispensable "Sauvagerie" de Ballard.

« L’avenir n’a rien à voir non plus avec un quelconque salmigondis – on ne saurait le lire dans le marc de café au fond d’une tasse en porcelaine, ni dans les lignes de la main, ni dans les boyaux d’un agneau, pas plus que dans les reflets d’une boule de cristal. Il n’a rien à voir avec les conjectures de nature sociale, l’imagination des poètes, les équations des scientifiques, la gouvernance du pouvoir politique ou les attentes et les exigences de la population. Il est réel. »

Ecouter la lecture de la première page de "Heimska La stupidité"

Fiche #1913
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Arni THORARINSSON

Le crime histoire d'amour
Métailié

6 | 140 pages | 07-01-2016 | 17€

Frida vient d’avoir dix-huit ans. Elle est enfin majeure et ce pourrait être un grand jour. Néanmoins, elle n’a pas oublié le temps passé où petite fille, elle était entourée d’une mère et d’un père aimants. Et puis, du jour au lendemain, ce fut l’enfer, les disputes, le silence et la séparation. La blessure est encore ouverte, aucun pardon, de l’incompréhension, de la haine mais aussi toujours de l’amour. Elle s’est éloignée d’eux sans les quitter des yeux. Cette journée devrait être particulière car ils lui avaient promis de tout lui expliquer le jour de ses dix-huit ans. Tiendront-ils leur promesse ? Quel est ce lourd secret qui a provoqué l’explosion définitive de cette famille, de sa famille ? Cette chronique d’une catastrophe annoncée est tendue, très tendue et surtout noire de noir !

Ecouter la lecture de la première page de "Le crime histoire d'amour"

Fiche #1729
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction : Eric Boury


Jón Kalman STEFÁNSSON

D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pied
Gallimard

5 | 444 pages | 12-08-2015 | 22.5€

Après son inoubliable trilogie, Jón Kalman Stefánsson nous offre un nouveau voyage au cœur de l’Islande, dans « l’endroit le plus noir du pays », une ville particulière oubliée de tous, Keflavik, « Celui qui habite Keflavik ne vit pas vraiment en Islande, ni tout à fait sur terre, il est ailleurs, à l’arrière de toute chose, perdu... ». Pour retracer l’histoire de ce bout de terre, Stefánsson joue avec le temps et sa chronologie en considérant la saga sur trois générations d’une famille, des marins, des pêcheurs, un poète, des femmes, de l’amour, des rêves, de la folie, la mort, c’est donc aussi l’histoire du temps, de sa force et son action inexorable, élimant tout sur son passage, l’amour, les vies et les mots bien aidé parfois par les politiques et leurs fameux cotas. Dense, âpre, puissant, humain, tout simplement éblouissant, mais dommage qu’un billet pour l’Islande ne soit pas glissé dans le roman !

« Nulle part ailleurs en Islande, les gens ne vivent aussi près de la mort. »

« … les souvenirs sont des gros blocs de pierre que je traîne derrière moi. »

« La vie, lit-on quelque part, est un faisceau de lumière qui traverse brièvement les ténèbres et s’évanouit l’instant d’après. »

« Je ne suis pas certain qu’on tente vraiment de comprendre les autres – faisons-nous réellement tous les efforts nécessaires ? N’essayons-nous pas, au contraire, constamment, notre vie toute entière, d’amener les gens à envisager le monde de la manière dont nous l’envisageons ? N’est-ce pas là un de nos plus grands maux ? »

« Celui qui lit tellement de poésie qu’il vient à imaginer qu’il peut nager jusqu’à la lune doit pouvoir vivre plus longtemps, le monde ne saurait se passer de ce genre de personnes. »

« La vie naît par les mots et la mort habite le silence. C’est pourquoi il nous faut continuer d’écrire, de conter, de marmonner des vers de poésie et des jurons, ainsi nous maintiendrons la faucheuse à distance, quelques instants. »

« Quel mal y a-t-il, évidemment aucun, nous devrions tous de temps en temps sortir en courant de chez nous et crier à tue-tête pour glorifier la vie, à moins que l’existence ne coule de source et ne relève à ce point de l’évidence ? Combien de fois sommes-nous sortis pour célébrer la vie, cet animal éreinté, cette fleur battue par les vents, cette note puissante et profonde ? »

Ecouter la lecture de la première page de "D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pied"

Fiche #1675
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Gudbergur BERGSSON

Deuil
Métailié

4 | 128 pages | 01-05-2013 | 15€

« Cette histoire est dédiée à la génération de l’éternelle jeunesse » : l’homme arrive au bout du chemin, l’issue est proche. L’homme est en effet très âgé, vit seul depuis longtemps, et revient avec un œil acéré sur sa longue marche vers le deuil et la mort, deuil d’une vie, de la vie, de ses proches. L’analyse est lucide, franche, réaliste, sans concession mais l’œil reste pétillant et le sourire du clown triste ; une distance voire une certaine autodérision introduisent une légèreté heureuse et salvatrice. Tout au long de cette analyse de la vie, de la vieillesse et la mort, la bouilloire chuinte, occupe l’esprit et marque l’attente. La vie se rétrécit et les souvenirs jaillissent de partout et nulle part. Un témoignage unique d’une certaine philosophie de vie, expérience aussi unique qu’universelle.

« … en chaque être humain sommeille le désir d’être irresponsable et de se livrer à tout ce qui lui vient à l’esprit, sous l’étendard victorieux de la maladie : nous sommes tous de pauvres types. »

« En vieillissant, on jaunit de l’intérieur tandis qu’on devient gris à l’extérieur. Tout cela est la faute aux reins et au foie, et sûrement pas aux sucreries. »

« Il n’existe rien de plus injuste que cette brutalité, cette violence qu’est le vieillissement. Personne ne vieillit de la même manière et il n’y a pas deux êtres qui le fassent selon les mêmes règles. Cette inégalité tient à la nature aussi diverse que semblable de l’être humain dans tous les domaines. Elle est l’unique loi de la vie. »

Ecouter la lecture de la première page de "Deuil"

Fiche #1289
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Jón Kalman STEFÁNSSON

Entre ciel et terre
Gallimard

3 | 255 pages | 29-04-2013 | 22€

La vie des pêcheurs islandais est âpre, le froid, la neige et les tempêtes, la mer et sa violence, la fragilité des embarcations… mais chacun part et repart même s’il sait qu’il peut s’agir du dernier voyage. Chaque marin sait ce qu’il doit faire et à quel moment. Malgré tout, leurs esprits voguent, s’occupent. Parmi eux, Baldur et le gamin ont une passion commune, la lecture et les mots et ils se font une joie de la partager sur mer. Mais le jour du départ, Baldur s’aperçoit qu’il a oublié le livre de poésie qu’il est en train de lire et repart le chercher. Il en oublie sa vareuse, erreur fatale, la mer et le froid ne pardonnent pas d’approximation. Au retour, le gamin que cette disparition a bouleversé et ébranlé, rapporte ce livre assassin à son propriétaire, autre amoureux des livres et de la lecture, sans avoir encore décidé s’il allait continuer le chemin de sa vie. Premier opus de sa trilogie, J.K. Stefánsson prouve immédiatement son sens du détail, son art de la description, son amour des mots et de la langue, il se dégage une grande puissance de ses textes. Le lecteur est immédiatement happé et immergé dans le récit, la vie, la mort, la douleur, la souffrance mais aussi le rêve, les espoirs, les petits instants de bonheur. Entre Ciel et terre, quoi d’autres que la vie et la littérature ?

« Les hommes n’ont nul besoin de mots, ici, en pleine mer. La morue se fiche des mots, même des adjectifs comme sublime. La morue ne s’intéresse à aucun mot, pourtant elle nage dans les océans, presque inchangée, depuis cent vingt millions d’années. Cela nous apprend-il quelque chose sur le langage ? Eh bien, nous pouvons peut-être nous passer des mots pour survivre, mais nous en avons besoin pour vivre. »

Ecouter la lecture de la première page de "Entre ciel et terre"

Fiche #1288
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Jón Kalman STEFÁNSSON

La tristesse des anges
Gallimard

2 | 380 pages | 10-08-2011 | 22€

Jens le Postier arrivé fraîchement (dans les deux sens du terme !) au village accepte de remplacer l’un de ses collègues et d'assurer une nouvelle tournée vers les derniers et dangereux fjords du Nord. Le gamin est désigné pour l’accompagner. Ces deux êtres totalement opposés se voient unis dans ce raid ultime face à la puissance destructrice de la nature : l’âge, l'expérience, le physique, la parole, les centres d’intérêt, tout les sépare. L’un se réfugie dans la solitude de l’effort pour s’oublier, l’autre rêve à ses lectures poétiques, à ses amours prochains et à sa vie future (« Leurs yeux se croisent, mais ils ne se disent rien, il est vrai que les mots peuvent être tellement vacillants, tellement fragiles, il existe un tel abîme entre eux et les choses qui s’agitent au fond de vous, et cette distance est souvent source de regrettables malentendus, il arrive même qu’elle détruise des vies. »). Pourtant cet effort et cette aventure tissent pas à pas, flocon après flocon, des liens forts, Jens a promis de ramener le gamin indemne mais c’est pourtant lui le premier qui sauve Jens d’une mort certaine dans les eaux glacés. Chaque pas est un combat, la recherche de l’itinéraire souvent hasardeuse. Mais leur arrivée généralement inattendue dans les fermes isolées est toujours un instant de joie. Les nouvelles défraîchies qui se fanent à chaque pas pourtant victorieux du combat contre le froid et la neige sont accueillies avec bonheur, de quoi oublier pendant quelques instants le quotidien si âpre. Le récit oscille entre les réflexions et introspections inhérentes à la solitude et à l’effort produit par les deux compagnons et la description de leur combat permanent contre le froid, le vent et la neige. La chaleur de leur relation ne fait que peu de poids face aux aléas climatiques subis. A lire au coin du feu !!!

Sélection Prix Page des Libraires 2011

« L’homme meurt si on le prive de pain, mais il dépérit et se fane en l’absence de rêves. »

« Nous mourons si nous n’écoutons pas ce qu’enseigne l’expérience, mais nous moisissons si nous y prêtons trop d’attention. »

« Peut-être n’est-ce pas Dieu qui a créé le pêché, mais plutôt l’inverse. »

« Les seuls fantômes que j’ai rencontrés, ce sont les vivants. »

« Les deux hommes se taisent, le gamin par timidité, Jens parce qu’il préfère le silence à bien des choses, le silence est un refuge, il vous procure la paix. »

Fiche #1003
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : Eric Boury


Arni THORARINSSON

Le septième fils
Métailié

1 | 351 pages | 20-09-2010 | 21.5€

Lorsqu’Einar, journaliste au Journal du Soir, est envoyé au fin fond de l’ouest de l’Islande, il s’attend au grand calme ! Il ne se passe rien à Isafjördur, ville emblématique de la crise de la région. Il doit pourtant traquer le scoop. Dès son arrivée, Einar apprend que des incendies suspects se produisent régulièrement, le dernier a lieu le soir où une grande fête regroupe le gotha de la ville, une ex-star du football accompagnée de sa cour et une petite starlette de la pop et ses groupies. Profanation d’une tombe, vol d’un camping-car, soupçons de trafic de drogue provoquent l’installation de ce journaliste solitaire chez un flic grognon mis à l’écart par sa hiérarchie. Einar a la capacité d’interroger, de faire parler les témoins et fait progresser l’enquête en parallèle de celle menée par une commissaire séduisante. Lorsqu’on retrouve le camping-car avec deux corps carbonisés à l’intérieur et qu’un député originaire d’Isafjördur qui n’en garde pas que des bons souvenirs meurt à Reykjavic les cervicales brisées, l’enquête devient brûlante… Le scoop est là ! Un polar prétexte à dresser un portrait réaliste de l’Islande contemporaine « légèrement » plus noire que la vision habituelle….

Article paru dans la revue "Page des Libraires"

Fiche #833
Thème(s) : Littérature étrangère Polar/Thriller/Noir
Traduction : Eric Boury